Chef de famille...

Le plus fort c’est mon père

 Par Claudine Rongione

  Jeune, dans une cour d’école, nous avons tous entendu au moins une fois dans sa vie un enfant s’écrier : mon père est plus fort que le tien!

  Je me souviens que vers l’âge de 8 ans, j’étais revenue de l’école un peu abimée et en pleurant.  J’avais reçu des coups, de la part d’un garçon, dans la cour d’école.  Et oui, l’intimidation à l’époque existait aussi.  Confiante, j’étais alors persuadée que mon père irait me défendre, tel un chevalier royal!  J’étais tout de même sa princesse!  Sinon à quoi servait cet homme si fort et robuste...

  J’ai eu toute une surprise, lorsque mon père m’a prise dans ses bras pour me réconforter et m’a dit : c’est aujourd’hui ma fille que tu vas apprendre des prises de judo, tu dois te défendre!  Bravo papa!  Toute cette confiance et cette fierté que j’avais envers lui venaient de partir en fumée.  Il me rassura en précisant que ces notions apprises m’aideraient à reprendre confiance en moi.  Il m’a alors dit qu’il n’irait pas à l’école pour me défendre.  À contrecœur, je débutais mes leçons de judo dans le salon, avec comme enseignant, un homme rigoureux et encourageant dans cette démarche, mon père.

  Quelle ne fut pas mon étonnement, après plusieurs jours, de constater mon instinct de défense au premier affront dans la cour d’école.  J’ai su me défendre!  J’étais si fière à mon retour à la maison quand mon père m’a caressé doucement les cheveux et m’a souri.

  Si nous lisons la définition du mot père dans le dictionnaire Larousse, l'homme est : celui qui a engendré ou qui adopté un ou plusieurs enfants.  Et au sens propre de la Loi: l'homme ayant autorité reconnue pour élever un, des enfants au sein de la cellule familiale, qui les ait ou non engendrés.

  À partir de cela, il est facile de croire que l’homme n’a pas besoin de s’impliquer, plus qu’il ne le faut, dans l’éducation d’un enfant.  Il est le pourvoyeur et nous n’avons qu’à reconnaitre son autorité!  Ah non!  J’entends déjà les protestations venir de tous les côtés…

  On peut facilement penser que c’était ainsi à une certaine époque et encore aujourd’hui, mais… 

  J’ai déjà connu un homme, qui pour protéger sa femme et ses enfants, a fait plus que travailler des heures de fous, il a défendu, clamé sa fierté, encouragé ses enfants à se dépasser, montrer le bon chemin à prendre pour réussir, déclarer son amour autrement.  C’était mon grand-père.  Et ce n’était pas en 2016…

  J’ai déjà connu un homme qui a pris soin de ses parents à son tour, au moment venu, quand ils ont eu besoin de lui.  C’était mon oncle.  Et ce n’était pas en 2016…

  J’ai déjà connu un homme qui jouait avec ses enfants, riait, taquinait et organisait des jeux et des sorties complètement enlevantes.  C’était un cousin.  Et ce n’était pas en 2016…

  J’ai déjà connu un homme qui savait transmettre le respect, le non jugement et les valeurs à ses enfants.  C’était un ami.  Et ce n’était pas en 2016…

  J’ai déjà connu un homme qui changeait les couches, alimentait, répondait aux besoins primaires et essentiels des enfants. C’était mon conjoint.  Et ce n’était pas en 2016…

  Je sais que le rôle du père était tenu par des hommes qui se conformaient au dictionnaire.  Mais le rôle de père peut être tellement plus!  Lancez-vous et vous verrez comme la vie peut apporter son lot d’expériences positives.  Faites comme certains hommes, prenez exemple!

  Quelques années plus tard, ma mère m’a avoué que mon père avait été à l’école le lendemain de cet incident que je vous ai raconté plus haut.  Il ne m’en a jamais parlé…

  Je vous le dis, c’était mon père, à moi, le plus fort…